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POÉSIES DE MON CŒUR (i)

Le fond et la forme

(note publiée le 16 janvier 2015)
Toute création, en particulier en littérature - est le résultat d'un mélange harmonieux entre le fond et la forme. Autrement dit : quoi dire ? Et comment le dire ?

J'ai déjà parlé dans deux précédents articles des notions de sincérité et de spontanéité. J'aimerais juste ici proposer à la réflexion du lecteur trois extraits de MM. Baudelaire, Chaufour et Banville. Voici.

Je plains les poètes que guide le seul instinct ; je les crois incomplets. Dans la vie spirituelle des premiers (les grands poètes), une crise se fait infailliblement, où ils veulent raisonner leur art, découvrir les lois obscures en vertu desquelles ils ont produit, et tirer de cette étude une série de préceptes dont le but divin est l'infaillibilité dans la production poétique... je considère le poète comme le meilleur de tous les critiques.

Baudelaire, Art romantique, XXI, II.

Il me plaît de constater que le maître avait, bien avant moi (et avant d'autres) noté que les poètes guidés par la spontanéité (« le seul instinct ») sont bien à plaindre... Permettez-moi de ne pas m'étendre davantage sur les idées de « but divin » et d' « infaillibilité » (et encore moins de « grands poètes ») qui me dépassent quelque peu. Quant au reste de cet extrait de l'Art romantique, il est par ailleurs suffisamment clair pour qu'il soit inutile de le commenter.

Il est constant qu'en l'absence d'un « sujet » (un mythe ou une fable qui ne peut être que donné ou révélé), le poète, contraint de renoncer à la vérité comme essence de la poésie, « versifie des discours » ou « fait des vers », se livre au « comment dire », à la virtuosité formelle, aux « poèmes de néant », à cela qui s'achève - après maintes stations - en lettrisme.

Ghislain Chaufour, commentaires sur Divers Jeux rustiques de Du Bellay, XXXII. À Bertrand Berger - NRF, Poésie / Gallimard.

Autrement dit : oui, on peut faire des vers sans faire de poésie. On peut même être un bon versificateur et n'être pas même un poète. Ce qui, d'après G. Chaufour, caractérise donc le poète, c'est la présence d'un « sujet », « un mythe ou une fable », « donné ou révélé. » Là encore, je ne m'étendrai pas sur l'idée. Il me semble toutefois qu'à mon modeste niveau, je parlerai plutôt de sincérité que de vérité. Ou alors de sincérité vraie (?).

Un poème, poiêma, est donc ce qui est fait et qui par conséquent n'est plus à faire, c'est-à-dire une composition dont l'expression soit si absolue, si parfaite et si définitive qu'on n'y puisse faire aucun changement... Ceci tranche une question bien souvent controversée : peut-il y avoir des poèmes en prose ? Non, il ne peut pas y en avoir, malgré le Télémaque de Fénelon, les admirables Poèmes en prose de Baudelaire et le Gaspard de la Nuit d'A. Bertrand ; car il est impossible d'imaginer une prose, si parfaite soit-elle, à laquelle on ne puisse avec un effort surhumain rien ajouter ou rien retrancher.

Banville, Petit traité de poésie française, Introduction.

Rien à ajouter.